La décision de Donald Trump de fermer la frontière aux ressortissants de sept pays musulmans a déclenché cafouillages et réactions virulentes à travers le monde.
Manifestations, condamnations politiques, pressions internationales… Dix jours après sa prise de fonctions, Donald Trump faisait face, lundi 30 janvier, à un feu nourri de critiques en réaction à sa décision de fermer les frontières à tous les réfugiés ainsi qu’aux ressortissants de sept pays musulmans. Son prédécesseur Barack Obama est même sorti de son silence pour encourager les Américains à se mobiliser.
Après un week-end de confusion et de controverses, le président républicain s’est défendu de toute discrimination antimusulmane, alors que dans le pays des milliers de manifestants se sont rassemblés dimanche à Washington, New York, Boston et dans d’autres villes et aéroports du pays.
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Le décret
Le décret paraphé par le président interdit pendant quatre-vingt-dix jours toute entrée sur le territoire américain des ressortissants de sept pays : le Yémen, l’Iran, la Libye, la Somalie, le Soudan, la Syrie et l’Irak. Cette liste pourrait être élargie à l’avenir sur proposition – au président – du département de la sécurité intérieure, en accord avec le secrétaire d’Etat.
Il bloque également pendant quatre-vingt-dix jours les entrées de réfugiés venant de ces pays, et les demandes des réfugiés syriens sont bloquées jusqu’à nouvel ordre. De façon plus générale, le texte bloque le processus d’admission des réfugiés du monde entier pendant cent vingt jours. Samedi matin, il avait été annoncé que le décret concernait les détenteurs de Green Card (visa de résident permanent aux Etats-Unis), avant que l’ordre inverse ne soit donné dimanche après-midi.
Donald Trump a annoncé dimanche soir que les Etats-Unis émettraient à nouveau des visas pour tous les pays concernés une fois mises en place des politiques de sécurité.
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Obama sort de son silence
L’ancien président américain Barack Obama est sorti de son silence lundi pour encourager les Américains à manifester pour la défense de la démocratie, dans un communiqué publié par son porte-parole, Kevin Lewis. Il a rejeté toute comparaison avec la politique étrangère menée sous son administration et a déclaré : « Le président [Obama] est en désaccord fondamental avec le principe de discriminer des individus en raison de leur croyance ou de leur religion. »
L’ancien président s’est félicité « du niveau de mobilisation » dans le pays :
« Le fait que des citoyens exercent leur droit constitutionnel d’assemblée, de mobilisation et de se faire entendre par leurs élus correspond exactement à ce que nous voulons voir lorsque les valeurs américaines sont en jeu. »
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La riposte judiciaire
A New York et en Virginie, des juges fédéraux ont imposé, samedi 28 janvier, un sursis d’urgence au décret de Donald Trump, après de nombreux recours déposés par des associations. Cette décision a pour conséquence d’interdire aux autorités américaines de refuser l’entrée ou d’expulser des personnes originaires des pays concernés par le décret, mais seulement si ses personnes disposent d’un visa valide.
Les autorités de l’Etat de Washington, dans le nord-ouest des Etats-Unis, ont elles annoncé lundi qu’elles porteraient plainte devant la justice fédérale contre le décret anti-immigration. Washington sera le premier Etat du pays à prendre une telle initiative.
« Personne n’est au-dessus de la loi, pas même le président », a déclaré le ministre démocrate Bob Ferguson, lors d’une conférence de presse. « Et au tribunal, ce n’est pas toujours celui qui parle le plus fort qui l’emporte. C’est la Constitution ». La plainte de M. Ferguson, la première du genre, cible le nouveau président américain ainsi que de hauts responsables de l’administration, notamment au département de la Sécurité intérieure.
Plusieurs leaders du monde musulman aux Etats-Unis ont également déposé plainte en Virginie contre ce décret. Nihad Awad, directeur exécutif du Conseil des relations américano-islamiques (CAIR), la principale association d’Américains musulmans, et 26 autres plaignants assurent dans leur plainte que le décret est de fait « un ordre d’expulsion des musulmans » qui viole la Constitution et la liberté religieuse.
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Fronde de diplomates américains
Plusieurs diplomates américains ont protesté officiellement par écrit contre le décret, a fait savoir le département d’Etat, sans donner de détails sur le contenu de ce texte, ni le nombre de diplomates qui le soutiennent ou l’ont signé. La Maison Blanche a riposté lundi par un ultimatum. « Soit ils acceptent le programme, soit ils s’en vont », a déclaré Sean Spicer, porte-parole de l’exécutif.
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Manifestations
« Les réfugiés sont les bienvenus ! », criaient dimanche quelque dix mille personnes dans un parc à la pointe de Manhattan, la statue de la Liberté visible au large, symbole depuis 1886 de l’accueil d’immigrés venus respirer l’air de la liberté.
Des milliers de manifestants se sont aussi fait entendre sous les fenêtres du président Trump dans le parc de la Maison Blanche, à Washington. « S’il a fait ça pendant ses sept premiers jours, qui sait ce qui nous attend dans les quatre prochaines années », dit une Serbe présente ici depuis dix ans, Sonja Davidovic, 37 ans.
Des manifestations ont également eu lieu dans plusieurs villes ou leurs aéroports (Seattle, Los Angeles, San Francisco…).
Lundi soir des dizaines de milliers de personnes se sont réunies à Londres, selon une source policière citée par l’Agence France-presse (AFP), brandissant des pancartes « Non au racisme, non à Trump » ou « Ne donnons pas la main aux fascistes ». Certains manifestants scandaient également des slogans critiquant la première ministre Theresa May, accusée de complaisance au Royaume-Uni vis-à-vis du président américain.
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