Alberto Fujimori ne finira pas ses jours derrière les barreaux. La Cour « rétablit les effets de la résolution suprême du 24 décembre 2017 qui a accordé la grâce humanitaire au plaignant, et prévoit sa libération », dans les prochains jours, indique l’organe de justice suprême du Pérou dans son arrêt consulté par l’AFP. Les décisions de la Cour constitutionnelle sont sans appel.

Trois juges ont voté en faveur de sa libération et trois contre, mais le vote du président de la Cour a compté double, rapporte notre correspondant régional, Eric Samson.

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« Ça a été une décision très ouverte, très intense, avec deux positions radicalement différentes » autour de la question de la « raison de santé », a déclaré à la radio RPP l’un des six magistrats de la Cour, Eloy Espinoza, qui a dit s’être prononcé contre la libération de l’ex-président.

« Ni pardon ni oubli »

La grâce, accordée la veille de Noël 2017 par le président de l’époque Pedro Pablo Kuczynski pour des raisons humanitaires, est ainsi rétablie. En octobre 2018, la justice avait annulé cette grâce, puis renvoyé en janvier 2019 l’ex-président Fujimori en prison. « Retourner en prison est une condamnation à mort lente et certaine », avait déclaré à l’époque Alberto Fujimori, aujourd’hui âgé de 83 ans et qui souffre de problèmes de santé.

C’est aux cris de « Tribunal corrompu », « Ni pardon ni oubli » et « Fujimori en prison » que des milliers de Péruviens se sont concentrés en fin d’après-midi dans le centre historique de la capitale péruvienne après l’annonce de la grâce. Le hashtag #IndultoEsInsulto – la grâce est une insulte – a été utilisé pour mobiliser les opposants de Fujimori à Lima, Cuzco et Arequipa. Le gouvernement a également critiqué cette décision dont il va demander l’annulation auprès de la justice internationale.

Coupable de crimes contre l’humanité

Alberto Fujimori a gouverné le Pérou d’une main de fer dans les années 1990. Pour certains, il est celui qui a dopé l’économie de son pays, et combattu avec succès les guérillas marxistes. D’autres se souviennent surtout de la corruption et de ses méthodes autoritaires. Face à une opposition croissante, il s’était enfui au Japon, d’où sa famille est originaire, en novembre 2000 et avait annoncé renoncer à son mandat par fax.

Après avoir été extradé du Chili en 2007, Alberto Fujimori a été reconnu coupable par la justice péruvienne de crimes contre l’humanité pour avoir commandité deux massacres perpétrés par un escadron de la mort en 1991-1992, dans le cadre de la lutte contre la guérilla maoïste du Sentier lumineux.

Alberto Fujimori est le seul détenu de la petite prison de Barbadillo, située dans les casernes de la direction des opérations spéciales de la police dans l’est de Lima, où il est retourné lundi après 11 jours dans une clinique pour soigner des problèmes cardiaques. Ses partisans et sa famille avaient demandé à maintes reprises, sans succès, sa remise en liberté pour raisons de santé.

Sa fille Keiko avait promis de le libérer en cas de victoire à l’élection présidentielle organisée en 2021. Sa défaite face au candidat de gauche Pedro Castillo l’en aura empêché. C’est finalement la justice de son pays qui permettra à son père de recouvrer la liberté.

Source : rfi.fr