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L’Afrique n’a pas besoin d’être réchauffée

« En Afrique, le réchauffement climatique peut aller un peu moins vite que le réchauffement avec la Russie. Mais il sera tout aussi dangereux ! »

Parmi les implications de l’évolution du peuplement africain, l’impact environnemental n’est pas le moindre. Ce dernier est fortement influencé par le contexte du développement : l’augmentation de la population et de ses besoins, la densification démographique, avec l’urbanisation rapide. Tout ceci exerce des pressions croissantes sur la ressource en eau, les terres, les forêts, la biodiversité et les littoraux.

Si les pratiques mal contrôlées de populations pauvres ont leur part dans les atteintes à l’environnement (défrichement, orpaillage, barrage, l’agriculture sur brûlure). Elle n’est pas le principal danger : la médiocre régulation des activités modernes menées par les acteurs nationaux ou mondialisés (agro-industrie, barrages, mines, pétrole, pêche) plus âpres au gains sur nos terres africaines que respectueux d’un développement partagé est autant déterminant.

En Afrique, comme ailleurs, les réponses apportées au défi environnemental sont ambiguës : oui les États africains intègrent tous aujourd’hui à leur agenda de développement, la nécessité de répondre à des besoins croissants en ayant le souci des équilibres écologiques. Mais il est bien difficile d’agir concrètement, dans les faits au-delà de l’écriture d’un bel agenda. Cette situation reflète la position périphérique de l’Afrique dans la mondialisation.

L’Afrique est le continent le plus tropical et le plus chaud de la planète, la variabilité climatique est inscrite sur la longue durée. Faible émetteur de gaz à effet de serre (3,2% du CO2 émis dans le monde), l’Afrique est pourtant très affectée par le réchauffement global en cours. Il est d’autant plus difficile de faire face aux changements que les modèles prévisionnels donnent des résultats incertains voire contradictoires.

En 2014, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) fait état de scénarios divers pour l’Afrique. La projection la plus fiable concerne l’augmentation de la température moyenne annuelle : elle devrait partout excéder + 2° C, notamment dans les régions arides, et pourrait atteindre localement +3° C, voire + 6° C. Les projections relatives aux pluies donnent des résultats contrastés : leur diminution est considérée comme probable en Afrique du Nord et au Sud-Ouest de l’Afrique australe, aggravant la sécheresse, au contraire, elles devraient croître sur les hautes terres, comme en Éthiopie, et dans certaines régions à topographie complexe, avec une multiplication des inondations.

Pour l’Afrique de l’Ouest dans son ensemble, les projections de l’évolution des pluies fournies par les modèles sont contrastées. A l’Ouest du Sahel, une diminution significative est anticipée à la fois par les modèles du GIEC et ceux du Met Hadley. Ailleurs, en particulier au centre-est, les désaccords sont nombreux et les prévisions incertaines, et le GIEC admet également que l’Afrique est l’un des continents les plus vulnérables en raison de la diversité des effets anticipés, et de sa faible capacité d’adaptation. Les conséquences des dégradations écosystémiques se feront sentir à n’importe quel endroit de la planète surtout en Afrique. Pour tous ces facteurs le droit international de l’environnement, plus particulièrement le régime juridique international de préservation du climat doit prendre des mesures idoines face à ces maux qui assaillent l’humanité et l’Afrique en particulier.

Si la déforestation ralentit au niveau mondial, elle continue de progresser en Afrique. L’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), a estimé une perte nette de 14, 2 millions d’hectares entre 2010 et 2015. Parmi les dix pays de la planète ayant la plus forte baisse annuelle de superficie forestière entre 1990 et 2015 figurent le Nigeria, la Tanzanie, le Zimbabwe, et la RDC, chacun ayant perdu 300.000 et 400.000 hectares de forêt chaque année.

A titre d’exemple, la forêt du bassin du Congo est aujourd’hui très en danger, pourtant c’est la plus vaste et la plus emblématique du continent. Auparavant elle était épargnée, mais des signes de dégradation et de déforestation s’observent désormais avec l’intensification de son exploitation. C’est grâce à elle que le continent possède la réserve de stockage de CO² la plus importante du globe, devançant même le bassin de l’Amazone, aujourd’hui.

Alors, l’Afrique subit massivement la crise climatique, mais elle a les capacités de se préserver du pire et d’être un contributeur majeur des politiques de sauvegarde du climat au niveau mondial. Ces dirigeants doivent tout faire pour que le cycle terrible : pauvreté – dégradation des milieux de vie – effondrement de la gouvernance des États, ne s’enclenche pas plus avant.

De nos jours plusieurs problèmes environnementaux se développent sur le continent : sur exploitation des matières première et des réserves végétales, pollution massive du golfe de Guinée et de ses zones minières, dégradation du delta du Niger. Nous vivons ce paradoxe : l’une des espèces la plus menacée par les activités humaines est paradoxalement l’espèce humaine et les africains.

D’après le rapport européen sur le développement, il s’avère que de nombreux pays de l’Afrique se trouvent dans une situation de fragilité en raison de plusieurs facteurs qui s’alimentent en boucle : conflits, gouvernance, dégât environnementaux.

L’Afrique de l’Ouest est dans une criminalité environnementale sans équivoque. Cette région est devenue un pôle d’exploitation et de transit pour le trafic d’espèces naturelles, elle concerne surtout la pêche illicite, l’exploitation forestière illégale et l’exploitation sans contrôle du respect environnemental dans les zones minières. Presque toutes les sociétés minières implantées en Afrique de l’Ouest ne respectent pas leur engagement pris et ne se soucient pas de l’exode des populations locales et son cortège de migrations en Méditerranée. Nous le devons à toutes ces connivences entre investisseurs hier européens ou américains et aujourd’hui Russe ou Chinois, avec leurs supplétifs africains qu’on a quelques difficultés à considérer comme des dirigeants au service du bien commun.

Alors quel doit être le rôle des États ?

La conférence de Rio a largement contribué à l’émergence du droit international de l’environnement qui comporte plusieurs conventions sur les changements climatiques de Kyoto et sur la biodiversité, des rencontres au cours desquelles les États africains ont pris part. A cela s’ajoute la convention sur la lutte contre la désertification dans les pays gravement touchés par la sécheresse. A la suite de cette perception de dérapage climatique du fait de l’homme, les conventions définissent l’objectif à atteindre, qui est de stabiliser la situation conformément aux dispositions pertinentes de la convention. Stabiliser également les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère à un niveau qui empêche toute perturbation anthropique dangereuse. Quant à la désertification, l’objectif principal de cette convention est de lutter et surtout d’atténuer les effets de sécheresse dans les pays gravement touchés, en particulier l’Afrique. Mais que de conventions et si peu d’actions concrètes …

Quant aux pays développés, il leur est demandé, dans d’autres conventions et protocoles de fournir des ressources financières importantes et d’autres formes d’appui pour aider les pays en développement, pour que la priorité soit accordée à l’Afrique, continent le plus touché par la désertification et la sécheresse et ne bénéficiant pas d’une économie lui permettant de lutter contre ces fléaux. Mais le continent le plus prometteur pour piéger le carbone et préserver la biodiversité.

Quelles Solutions : sur ce point l’Afrique doit d’abord protéger sa végétation, valoriser des pratiques agricoles durables, renforcer l’accès à l’énergie tout en diminuant le recours aux énergies fossiles et surtout augmenter les rendements agricoles pour assurer la sécurité alimentaire à une population grandissante sans impacter négativement les sols et la biodiversité. Le catalogue des solutions est aussi simple qu’ambitieux, aussi évident que repéré :

1 – disposer de ressources financières massives, gérée dans le respect du droit international;

2 – s’assurer d’une ingénierie d’agri-développement performante et qu’elle maîtrise;

3 – contribuer au pilotage mondial en évaluant ses projets, en vérifiant la bonne allocation des moyens, en rendant compte

4 – Jeter aux orties toute forme de dépendance politique ou économique, celle d’hier, comme celle d’aujourd’hui : la Chine-Afrique ou la Russe-Afrique. 

Car les équilibres du monde penchent vers l’Afrique et pas seulement vers l’Asie

l’Afrique face aux changements climatiques Amadou BAH

Amadou BAH

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