Le 10 mai, vous avez été nombreux à me témoigner affection et tendresse pour mon anniversaire. Vos messages m’ont touchée. Une mention spéciale aux cadres et militants de l’UFDG qui m’ont honorée avec tant de chaleur lors de notre Assemblée générale.
Mais en vérité, mon cœur n’était pas tout à fait à la fête.
La veille, en cours à Sciences Po Paris, ma professeure de Gender policies nous a confié qu’elle avait paramétré son téléphone pour qu’il sonne toutes les dix minutes. Une alarme volontaire. Un rappel méthodique et implacable : toutes les dix minutes, une femme ou une fille est tuée dans le monde par un proche.
Ce geste m’a bouleversée. Car cette alarme, c’est plus qu’un chiffre : c’est un rituel de mémoire. Une manière de refuser l’oubli par la répétition consciente.
Et alors j’ai pensé à Foniké Menguè, à Billo Bah, à Marouane, disparus dans le silence étouffant de la répression. J’ai pensé au père de Billo, mort de douleur, sans jamais savoir. Eux aussi, la vie ou la dictature nous les ont arrachés. Et eux aussi méritent qu’une alarme intérieure nous les rappelle sans relâche.
Car l’oubli est une forme de disparition seconde. Et parce que l’injustice gagne toujours du terrain quand la mémoire recule.
Nous devons créer nos propres rituels de rappel : parler d’eux, raconter leur histoire, dire leurs noms, encore et encore. Refuser que la routine, le bruit ou l’usure des jours les fassent disparaître une seconde fois.
Merci pour vos pensées. Mais souvenons-nous ensemble : la mémoire est un acte de résistance.
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