Depuis maintenant quelques années le gouvernement guinéen s’est lancé dans une terrible et regrettable opération de déguerpissement pour dit-il des projets d’intérêt national et/ou désengorgé les voiries publiques.
S’il faut condamner une telle opération qui laisse des centaines de familles à la belle étoile à quelques mois de la saison pluvieuse et sans aucun accompagnement, il faut aussi, étant intellectuel, revenir sur la plénitude de ladite opération.
En effet, en République de Guinée, c’est le code de la construction et de l’habitat qui régit la construction des ouvrages de génie civile qu’ils soient publics ou privés.
Ainsi, ce code stipule en son Chapitre I : Règlesfondamentales en matière de construction
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« Article 24– Aucune construction de quelque nature ou destination qu’elle soit, ne peut être édifiée à moins de :
Ainsi, vu le contenu des articles cités ci-haut, bon nombre des constructions en guinée sont illégales et au sens de la loi,doivent simplement être démolies comme le stipule l’article 26 dudit code :
« Article 26- Toute infraction aux dispositions des articles 20 à 25 du présent code, sera sanctionnée par la démolition pure et simple par l’administration compétente de l’ouvrage réalisé, sans indemnisation ni recasement. »
Cependant la démolition elle-même obéit à une procédure. En effet, dans son article 2 le code définit non seulement le projet d’intérêt national :
« Article 2- Au sens de la présente loi, on entend par :
Expropriation pour cause d’utilité publique : l’opération qui permet à l’Etat et/ou à une collectivité territoriale, de contraindre tout titulaire de droit réel immobilier à lui céder ledit droit, dans le but de réaliser un objectif d’utilité publique ou d’intérêt général, en contrepartie d’une juste et préalable indemnisation ;
Il apparait clairement ici que le gouvernement peut et doitexproprier voire même démolir les constructions illégales mais à condition de procéder à une indemnisation préalable et équivalente au minimum à la valeur de la construction à démolir.
De même, l’article poursuit :
Permis de construire : le document demandé par le maitre d’ouvrage ou le maitre d’œuvre, et délivré par l’autorité administrative compétente, autorisant la réalisation de l’ouvrage concerné ;
Permis de démolir : le document délivré par la même autorité administrative autorisant la démolition de tout ou partie d’un ouvrage ;
Permis de modifier : le document délivré par la même autorité administrative autorisant la transformation des parties d’un ouvrage ; »
A la lecture des faits, la démolition est certes légale mais obéit à une condition sine qua non, celle relative à l’obtention du permis de démolir. Autrement dit, il est inadmissible et impossible au sens de la loi de procéder à une quelconque démolition d’un quelconque ouvrage sans demander et obtenir le permis de démolition. Et l’obtention de ce permis obéit à une procédure qui décrit le demandeur de la démolition, la ou les raisons, l’information et/ou l’acceptation du propriétaire de la construction à démolir, le dédommagement et le recasement prévu, l’usage qui en sera fait de la zone démolie…
D’aucuns diront que ce sont des occupations illégales ; soit : La question qui se pose est la suivante : la violation de la loi par Paul obligerait-elle Pierre à violer à son tour la loi ? NON et NON.
Il est vrai que la spéculation foncière et immobilière aidée par la corruption à tous les niveaux a poussé presque chaque guinéen à avoir comme objectif primordial d’acquérir un terrain et y érigerdomicile et ce quel que soit les conditions. Ce qui n’est pas normal dans un état sérieux. Dans les états sérieux, le citoyen ne construit presque pas de maison ; c’est l’état qui en construit des logements sociaux bas standing HLM (Habitat à Loyer Modéré) et haut standing (Quartier Résidentiel). Le citoyen occupe en fonction de son revenu et peut souscrire à une assurance lui permettant avec le temps d’acquérir l’espace occupé.
Malheureusement encore, ici, même ce contrat d’assurance Travaux Bâtiments stipulé par les articles 49 et 50 du code n’estpas respecté.
Pourtant, c’est ce contrat qui aurait pu permettre aux victimes d’aujourd’hui de transférer la gestion du risque de devenir SDF à l’assurance.
Comme on le voit, violation de la loi, il y eut aussi bien du côté des occupants que du côté de l’Etat. Ce qui est navrant c’est comment tout un gouvernement peut se lancer dans une telle opération sans prendre le temps de lire et de respecter la procédure qu’il à lui-même mis en place ?
Ghaly Sow