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Discrimination des femmes voilées en Guinée : Mme Sarata Sidibé, Guinéenne, musulmane, et voilée écrit au ministre de la cuture

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À l’attention de :
Monsieur le Ministre de la Culture, du Tourisme et de l’Artisanat
Monsieur le Ministre de la Justice et des Droits de l’Homme
Monsieur le Secrétaire Général des Affaires religieuses
Madame la Ministre de la Promotion féminine, de l’Enfance et des Personnes vulnérables
Monsieur le Premier Ministre, Chef du Gouvernement
Et à l’ensemble des défenseurs des droits et libertés publiques en République de Guinée.

Je m’appelle Sidibé. Je suis Guinéenne. Je suis musulmane. Je suis voilée. Et je suis fatiguée.

Fatiguée d’être pointée du doigt. Fatiguée d’être suspectée. Fatiguée d’être exclue, ignorée, méprisée dans le pays qui m’a vue naître.

Il y a quelques jours, avec mes sœurs, nous avons décidé de vivre un moment simple, paisible : dîner à l’hôtel Noom de Conakry. Un buffet, une sortie entre femmes, un instant de vie ordinaire. Nous avons payé l’entrée. Aucune remarque, aucun avertissement. Mais à peine le paiement effectué, on m’a informée que je ne pourrais pas entrer. Pourquoi ? Parce que je porte le niqab. Parce que je couvre mon visage, comme d’autres couvrent leurs cheveux, leurs bras, leurs convictions.

On m’a sommée de le retirer, ou de partir. Sans remboursement. On m’a même déclaré que “le niqab n’est pas recommandé par l’islam”.

Depuis quand les réceptionnistes sont-ils devenus des guides religieux ? Depuis quand les établissements privés ont-ils le droit d’imposer une lecture personnelle de la foi ? Surtout : depuis quand, en Guinée, refuse-t-on l’accès à une femme à cause de sa pratique religieuse ?

Je pose publiquement ces questions et j’attends des réponses : Une femme voilée a-t-elle encore le droit de circuler librement dans ce pays ? L’Hôtel Noom a-t-il agi conformément à la loi guinéenne ? La Guinée reste-t-elle une République laïque qui garantit les libertés de croyance à tous ses citoyens ? Pourquoi le corps de la femme musulmane reste-t-il toujours une cible de suspicion et de contrôle ?

Je n’ai enfreint aucune loi. Je n’ai agressé personne. Je suis simplement une citoyenne, croyante, attachée à sa dignité. Et je ne suis pas seule.

À l’hôtel Palm Camayenne, des femmes voilées ont également été refoulées. Le motif ? “L’une d’entre elles aurait volé par le passé.” Doit-on rappeler le caractère absurde — et illégal — de cette généralisation ? Si une femme non voilée avait commis un vol, aurait-on interdit l’entrée à toutes les femmes non voilées ? Non. Ce n’est pas une règle. C’est une discrimination ciblée.

J’appelle le Gouvernement guinéen à sortir du silence. Car le silence, ici, devient complice.

Nous exigeons une prise de position claire : Les femmes musulmanes voilées ont-elles encore leur place dans les lieux publics de ce pays ? Nous ne nous tairons plus. Nous ne nous cacherons plus pour vivre notre foi.

Et à ceux qui pensent que “sortir, aller au restaurant” est interdit à la femme musulmane, nous disons : vous êtes dans l’ignorance. L’Islam ne nous interdit ni la vie, ni la liberté, ni la dignité. Ce combat n’est pas seulement religieux. Il est citoyen. Il est féminin. Il est guinéen.

Tant qu’une seule femme en Guinée devra choisir entre sa foi et sa liberté, alors aucune de nous ne sera réellement libre.

À quand une Guinée où toutes ses filles seront respectées — voilées ou non ?

Conakry, le 7 juin 2025

Mme Sarata Sidibé

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